[voir aussi l'article "le coprophage en chanson"]
Si la chanson* dit que Youki « a mangé des bouts de caca » et que c’est un « gros dégoutant », ce n’est pas pour autant qu’il faut s’y fier !
La coprophagie, fait d’ingérer les excréments, est un comportement incompris d’un point de vue humain (pourtant, bien des comportements humains sont généralement incompris d’un point de vue canin, comme faire ses besoins dans un lieu destiné à cet endroit ou bien encore les étreintes par exemple).
Nous sommes nombreux à être incapables de laisser notre chien savourer tranquillement ce qui est sorti du derrière d’un autre animal (ou du sien), le plus souvent, par convenance sociale : parce qu’il nous est inconcevable d’en ingérer nous-mêmes ou parce que nous faisons partie des gens qui raffolent des léchouilles. Mais s’il est peu ragoûtant de se faire recouvrir le corps par une langue aux effluves de fosse sceptique (...quoique certains chiens n’ont pas besoin de faire la litière du chat pour avoir une haleine de surlendemain de fête !), nous devons néanmoins garder à l’esprit que, le plus souvent, la coprophagie est un indicateur de mal être de notre animal.
Alors pourquoi Youki se comporte-t-il ainsi ? Il peut y avoir de nombreuses raisons qui le poussent à se comporter ainsi. En voici donc les principales :
- Par crainte des réactions de son humain. C’est un comportement fréquent lorsque l’animal s’est fait réprimander pour ne pas s’être retenu. Le chien va alors chercher à cacher "l'objet du délit" et va par ailleurs adopter les comportements d’apaisement (dits de « culpabilité » !) qui en découlent.
- Il peut s’agir d’un jeu, d’une sorte de mimétisme par rapport au propriétaire. Nettoyer devant son animal peut l’inciter à faire comme nous.
- Par attirance olfactive, principalement pour les excréments de chats (du aux agents de conservateur et aux protéines présentes dans leur nourriture) et d’herbivores (du aux vitamines B et acides gras volatiles).
- Pour des raisons médicales, tels certains types de parasitismes intestinaux et digestifs ou encore une mauvaise gestion alimentaire (avec une nourriture non adaptée par exemple).
- Pour effacer la présence d’un autre individu (en ingérant ses selles, il n'est olfactivement plus présent).
«Il sait qu’il a mal fait mais il recommence !»
L’animal ne connaît pas les notions du Bien et du Mal et ne connaît pas non plus le concept de culpabilité qui est purement humain. Néanmoins, il perçoit notre colère, nos traits crispés, notre voix irritée… il les a déjà vu et s’en souvient ! Il associe notre retour à un mauvais moment à passer et adopte l’attitude de crainte et d’apaisement qui en découle. Il faudrait donc qu’il ait le sentiment d’avoir « commis une faute » pour ne pas recommencer, mais ce n’est pas le cas.
Pour savoir ce qui incite notre chien à ingérer les matières fécales, posons-nous quelques questions :
* Depuis quand fait-il cela ?
* Comment cela est-il apparu ?
* Quelle a été notre réaction la première fois et les fois suivantes ?
Ce comportement est difficilement supprimable mais on peut faire en sorte de ne pas l’inciter en prenant garde à certaines choses :
- Ramassons quotidiennement les souillures présentes dans notre jardin en procédant toujours hors de sa vue (il pourrait vouloir nous imiter, surtout que nous leurs manifestons un fort intérêt) et gardons-le en laisse quand il y a trop de risque afin d’éviter d’être inutilement énervé.
- Cessons de le gronder quand il ne s'est pas retenu !
- Le mieux reste la neutralité : ne pas réagir, ne pas porter attention à lui dans ces moments là. Comprenons ce qui a déclenché cela dans notre attitude et modifions nos conduites afin qu’il modifie les siennes.
L’anticipation est certes une méthode redoutable pour lutter contre ces mauvaises habitudes mais elle ne fait pas tout. Elle n’agit que sur la manifestation du problème et non pas sur la ou les causes. Ne nous intéressons pas seulement à cette manifestation (l’ingestion) mais concentrons-nous sur ce qui induit ce comportement afin d’agir sur les racines du problème. Il suffit généralement de quelques ajustements dans le système relationnel (avec l’aide éventuelle d’un comportementaliste) afin d’améliorer ces comportements indésirables.
Victoria Chasle Castillo
Comportementaliste
www.1001comportements.com
Illustration de Patrice Seiler
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